AMEN VIANA, L’Afrocanalyst Rock & Blues
L’artiste Togolais Amen Viana se définit musicalement comme un caméléon : Celui qui touche à tous les instruments et qui s’adapte à toutes les musiques. À travers son nouvel album, The Afrocanalyst, il propose de traverser le monde en sa compagnie, de l’Afrique aux différentes contrées du monde. Il raconte son histoire. Rencontre.
Couleur Café : Ton projet s’intitule The Afrocanalyst, qui veut dire ?
Amen Viana : j’ai contracté « l’afro- psychanalyste » en « Afrocanalyst ». Il s’agit d’un personnage qui fait un témoignage, qui s’adresse à ces personnes qui sont parties d’Afrique pour des raisons diverses. Lorsqu’on voyage, on exprime la nécessité de raconter son histoire. « L’Afrocanalyst » peut aussi être défini par d’autres personnes qui sont venues d’autres continents, qui ont aussi migré vers d’autres pays.
CC : Pour faire un lien avec ta propre histoire, ton propre voyage a-t-il été long ?
AV : Oui et non. J’ai entamé ce voyage parce que j’ai eu envie de partir de chez moi et de vivre d’autres aventures, rencontrer d’autres personnes non seulement pour la musique, mais aussi pour des raisons familiales. Lorsque je suis venu en Europe, j’ai rejoint ma famille qui y était déjà, ce qui m’a permis d’avoir un cadre. Oui, ce voyage a été long parce que je suis parti depuis bientôt 20 ans et j’avais envie de raconter cette histoire. Et non, parce que j’ai toujours gardé un pied au Togo pour me ressourcer, nourrir mon histoire, qui part d’Afrique et dans l’autre sens, qui va d’un autre point vers l’Afrique.
CC : En somme cet album est aussi le fruit de tes expériences
AV : « L’Afrocanalyst » c’est aussi celui qui a pu s’adapter à plein de situations. J’ai débarqué en France en tant que musicien et guitariste, j’ai proposé mes services à plein d’artistes aussi bien dans la variété française, le jazz, le blues, le rock. J’étais considéré comme un joueur de foot qui joue à plusieurs poste, et « l’Afrocanalyst » m’a permis de conserver mon authenticité. Il s’agit de ne pas oublier d’où on vient, de faire de toutes ces expériences, sa propre histoire et de la rendre unique.
CC : C’est ainsi que tu as invité Akua Naru, Keziah Jones.
AV : C’est aussi une manière de tendre la main à des personnes que j’affectionne, avec lesquelles j’ai collaboré, qui sont devenues des amis et qui ont accepté de participer à mon histoire. Ayant participé à leur histoire, ce n’est qu’un retour. J’ai fait deux duos, avec Akua Naru et Keziah Jones, dans mon album.
CC : Tu te sens plutôt rock ou blues ?
AV : « L’Afrocanalyst » s’adapte à plein de styles. De tous ces mélanges en ressort une musique plutôt afro-rock. Je suis un enfant de Jimi Hendrix, ça reste ma référence et mon inspiration, je suis une sorte de « Jimi Hendrix à l’Africaine ». Je me situe entre Jimi Hendrix et Bob Marley. Bob Marley pour son côté engagé, son charisme, ses textes, il a aussi beaucoup défendu l’Afrique. Et Jimi Hendrix parce qu’il a une âme africaine qu’on peut entendre dans sa musique.
CC : Pour rappel, tu chantes en français, en anglais et en mina dans ton album, est-ce aussi une façon de conter ton histoire ?
AV : C’est une réalité. J’ai beaucoup voyagé, j’ai fait le tour du monde. Le message doit être universel, global et j’essaie de toucher à ma manière le plus large public possible.
CC : À l’écoute de ton album, on y ressent plus de maturité, d’assurance et on se dit que tu es prêt à aller encore plus loin
AV : Tout simplement parce que j’ai grandi, en tant qu’homme et musicien, j’ai plus d’expérience que lorsque j’ai débarqué en France il y a une vingtaine d’années. Je suis sage dans mes choix de collaboration ou de jouer ma propre musique, mes arrangements, ma créativité.
CC : Prenons au hasard le titre Brother qui est le premier titre de ton album et qui résume toute ta personnalité
AV : Cette chanson s’inscrit dans mon style musical : Il y a du rock, des mélodies mandingues ainsi que du blues. Tout ce mélange vient de l’Afrique, qui est la source et qui inspire le monde. Cette chanson caractérise le mieux mon style, l’afro-rock.
CC : Tu continues à accompagner d’autres artistes tout en menant une carrière solo, quel est ton but ?
AV : Je suis sideman de pas mal de musiciens, ce qui ne m’empêche pas de mener ma propre carrière. J’ai plus de chose à dire. Je me dirige vers plus de collaboration que le fait d’accompagner des artistes. Je collabore avec des artistes comme Christophe Mae, Angélique Kidjo et Keziah Jones, qui sont des artistes bien installés et avec lesquels je me sens bien. Ils ont leur façon de raconter leur histoire, et j’arrive à m’y intégrer.
Avec mon album, je passe à une nouvelle étape, j’essaie de définir clairement ma feuille de route en tant qu’artiste.
CC : Comment The Afrocanalyst a-t-il été reçu au Togo ?
AV : Il a été très bien reçu au Togo, nous y avons fait une tournée cette année, le public de Lomé a vu que je proposais autre chose, ma pluralité. Je suis content d’avoir pu le défendre dans mon pays, c’était important.
CC : Tu es multi-instrumentiste, dans ton album tu as pratiquement joué de tous les instruments, comme Prince
AV : On me connait beaucoup plus comme guitariste, mais parfois lors de mes collaborations je joue de la batterie, de la guitare basse et des percussions. Sur cet album, le personnage est pluriel, j’ai pris le temps d’explorer mes talents de musicien. La réalisation de cet album a été longue, je me suis posé pour mieux explorer ma personne.
CC : Est-ce que tu penses avoir eu assez de recul pour explorer ta propre personnalité ?
AV : On peut avoir du recul à partir du moment où on prend son temps. J’ai pris mon temps, l’aboutissement de cet album s’est étalé sur plusieurs années. J’ai enregistré dans des studios à Berlin, en France. J’ai essayé de prendre le plus de recul possible et cet album, The Afrocanalyst en est le résultat.
Album : Amen Viana, The Afrocanalyst,
En concert au New Morning Paris le 21 novembre 2023.