AMINA ELTMALI, PASSIONNÉE DE CULTURES ET DE L’AFRIQUE
Donner une plus grande visibilité à la création africaine.
Par Patrick Nellè
Amina Eltmali a travaillé pendant plusieurs années pour des médias panafricians installés à Paris, notamment Télésud et Paris Pluriel, mais son aventure africaine commence véritablement en 2010, quand la marocaine débarque à Dakar « avec juste un sac à dos, deux pilotes d’émission » et la volonté de promouvoir une narration « plus positive de l’Afrique ».
Pendant son séjour de huit ans en Afrique de l’Ouest, trois événements vont particulièrement la rapprocher de l’univers créatif africain et contribuer à forger le projet qu’elle porte aujourd’hui : « Ma rencontre avec Youssou Ndour trois jours après mon arrivée au Sénégal, le Festival mondial des Arts nègres (Fesman) à Dakar en 2010, et mon travail de journaliste freelance pour des médias sénégalais et guinéens », confie-telle.
Vivant « entre le Maroc et la France », elle se consacre désormais à la promotion de l’artisanat « Made in Africa ». Dans cette interview accordée à Couleur Café, Amina Eltmali confesse sa passion et son ambition d’assurer une meilleure visibilité internationale à l’artisanat africain.
Quel problème majeur avez-vous identifié dans le secteur de l’artisanat en Afrique ?
Mon passage dans les médias africains à Paris et en Afrique de l’Ouest m’a permis de réaliser un certain nombre de chroniques et d’interviews autour de la création africaine, et de participer au FESMAN en 2010 à Dakar, en tant qu’attachée de presse à la section mode. Ces expériences cumulées m’ont ouvert les yeux sur la nécessité de donner une plus grande visibilité à la création africaine et, tout particulièrement au secteur de l’artisanat. En effet, le secteur de l’artisanat en Afrique, souffre d’un grand déficit, tant du point de vue de son organisation, que de sa visibilité. Or, l’un ne va pas sans l’autre. On ne peut pas vouloir rendre visible un secteur qui peine à se structurer… Quelques pays font exception à la règle, tels que l’Afrique du sud, le Burkina-Faso, le Maroc… Le secteur de l’artisanat est un secteur clé en Afrique. Aucun développement ne pourra se faire sans avoir pris la mesure de la nécessité de consolider nos acquis, à savoir le patrimoine que représente l’artisanat en Afrique. D’ailleurs, la première action que nous avons souhaité mener ma collaboratrice ivoirienne et moi-même au sein de notre association Yes we African, est une campagne de sensibilisation auprès des Ministres de la culture des gouvernements de l’Afrique de l’Ouest, de la nécessité de faire reconnaitre les savoir-faire des tissus africains par l’Unesco. Imane Ayissi, fait un immense travail dans ce sens, et nous lui sommes très reconnaissants, mais la volonté d’une poignée de créateurs ne suffira pas, il faut une réelle volonté des décideurs africains…
Qu’est-ce qui vous a incité à vous lancer dans la promotion des artisans ?
En tant que marocaine, j’ai eu la chance de baigner depuis toute petite, comme bon nombre de marocains, dans un univers parsemé de produits artisanaux venants du Maroc. Je dois avouer d’ailleurs que mon amour pour l’artisanat marocain et subsaharien remonte à cette période. L’artisanat au Maroc étant un secteur clé, j’ai eu la chance, de découvrir tout un tas de choses via la Maison de l’artisan et les divers salons qui ont lieu chaque année au Maroc. En 2009, je décide donc de lancer, le premier portail d’info dédié à la création marocaine, avec un intérêt certain pour l’artisanat made in Morocco (madeinmorocco.info)
Après une immersion de huit ans en Afrique de l’Ouest (Sénégal, Guinée Conakry), je suis rentrée en France fin 2018, avec cette idée de mettre sur pied une plateforme qui serait dédiée à la valorisation des produits africains. Les évènements de ces derniers mois ont mis à mal le tourisme mondial, et tout particulièrement l’artisanat en Afrique. C’est à la suite de ce constat, que j’ai décidé de réorienter mon projet en direction de la valorisation de l’artisanat made in Africa. Aujourd’hui plus qu’hier, nous devons aller à l’essentiel, à savoir la préservation et la sauvegarde de notre patrimoine, que l’on soit africain ou d’origine africaine. Voilà ce qui m’a motivée à travailler à donner une plus grande visibilité à l’artisanat africain.
Pouvez-vous définir la particularité de votre action en quelques mots ?
Je voue une passion indélébile pour l’Afrique et ses cultures. L’artisanat et la création africaine ne font sans aucun doute partie. Cette passion me guide depuis 2008, et c’est cela qui me pousse à mener toutes ces actions en faveur d’une plus grande reconnaissance de l’artisanat made in Africa… Mon point d’ancrage est bien évidemment le Maroc, et tout particulièrement Marrakech, qui est à mes yeux une ville pleine d’inspiration au niveau créatif…
Avez-vous créé une structure pour adresser cette question ?
Ma structure et mon association portent toutes deux le même nom, qui est d’ailleurs le nom d’une de mes émissions. C’est à la fois, un leitmotiv et un slogan que je me suis assignée. Yes we African, car chaque africain doit se dire aujourd’hui que tout devient possible depuis le continent, nous n’avons plus besoin de venir en Europe ou aux Etats-Unis pour réussir.
Quels sont les écueils que vous rencontrez ?
Toute ambition aussi minime soit-elle demande des moyens et une équipe. Pour le moment, je suis seule à bord du navire entreprise. Avec le temps, j’espère pouvoir recruter du personnel, afin de me donner les moyens de mes ambitions… Pour reprendre la citation de Nelson Mandela, je dirais que « cela semble toujours impossible, jusqu’à ce qu’on le fasse. » Il faut alors, commencer, le reste suivra son cours…
Comment entrevoyez-vous l’avenir, dans un contexte encore marqué par le Covid19 ?
Je bénéficie actuellement d’un accompagnement de Meet Africa Maroc, je suis aussi accompagnée par l’Association Maroc Entrepreneurs qui travaille en fait en étroite collaboration avec Meet Africa et accompagne les lauréats marocains de l’édition numéro 2 de Meet Africa. Donc à court terme J’espère grâce à cet accompagnement pouvoir améliorer mon business model. Ensuite, à plus long terme, rechercher des partenaires financiers pour.
Dans un contexte encore profondément marqué par le Covid19, comment voyez-vous l’avenir ?
Avec le covid19 il va falloir tout miser sur le numérique, se déplacer d’un point à l’autre devient de plus en plus compliqué. Il va falloir prendre en considération les nouvelles tendances, et s’adapter au nouveau monde qui est déjà là.