Malika Zarra, des airs de liberté
Malika Zarra est une chanteuse, autrice et compositrice marocaine à la fois attachée à ses traditions et ouverte sur le monde. Sa musique illustre sa personnalité, ouverte et colorée. Elle nous présente Rwa, un album qui symbolise la liberté.
Couleur Café : Comment as-tu rencontré le jazz ?
Malika Zarra : J’ai commencé par apprendre à jouer de la clarinette, ensuite j’ai joué dans une fanfare avec des copines. Notre professeur de solfège était un batteur de jazz, il m’a initiée au jazz et j’étais touchée par la liberté qu’il y a dans cette musique, l’improvisation, qu’on retrouve dans toutes les musiques traditionnelles. J’ai trouvé un lien par rapport à ma culture. J’ai été au conservatoire, je me trouvais un peu trop enfermée et le jazz m’a libérée.
Couleur Café : Ton album s’intitule Rwa, qui signifie ?
Malika Zarra : C’est un terme en berbère, que je cherchais avant même que les morceaux de l’album existent, qui exprime le fait de créer quelque chose ensemble (avec d’autres personnes). C’est un vieux mot qui a disparu du parler amazigh, qui définit un groupe de personnes se retrouve pour extraire une essence, une huile, une récolte. C’est exactement ce que je voulais exprimer sur cet album. J’ai eu la chance de pouvoir vivre entre la France, le Maroc et les États-Unis, mes rencontres sur ces 3 continents ont fait ce que je suis aujourd’hui. J’ai commencé à écrire les morceaux de l’album au Maroc, ensuite j’ai commencé à l’enregistrer à New York et je l’ai terminé à Paris.
CC : C’est un album assez éclectique, à la fois, jazz, blues avec des sonorités africaines arabes et orientales
MZ : Je souhaitais, à travers cet album, rendre hommage à des personnes que j’ai rencontrées dans les pays où j’ai vécu. Je ne voulais pas me limiter à une seule esthétique, je voulais faire ressortir toutes les influences que j’ai reçues. Il n’y a vraiment pas de frontière. Je n’ai pas cherché à me limiter.
CC : Tu chantes aussi en plusieurs langues
MZ : C’est le premier album où je chante en darija, qui est un arabe dialectal marocain. J’aime chanter dans différentes langues. En tant que vocaliste, je trouve cela très intéressant parce que chaque langue apporte des ouvertures et des placements différents, des sons propres aux langues. Il y a aussi l’histoire de la langue maternelle : lorsqu’on chante dans sa propre langue, l’émotion qui s’en dégage est différence par rapport à une langue autre. Émotionnellement, ce sont des choses qui me touchent et j’essaie de donner la place au darija, qui a des influences berbère, arabe, espagnole, française, allemande, anglaise. Pour cela, je me suis aussi entourée de deux autrices marocaines. Je me suis reposée sur elles pour réécrire ou proposer d’autres textes basées sur les thèmes sur lesquels je voulais travailler. Il y a aussi une chanson en malgache, écrite par l’écrivain Jean-Luc raharimanana. J’ai combiné une chanson marocaine avec un texte en malgache. La chanson s’intitule Mamalia, elle parle de la force l’espoir et du sourire pour se relever. Il y a aussi le titre Yallah Tnam Rima, chanté avec Mamani Keita, qui a été écrit pour la chanteuse libanaise fayrouz. C’est une berceuse qui est tirée d’une comédie musicale. J’en ai fait une version différente, il y a un passage chanté par Mamani.
CC : Quelles sont tes couleurs préférées ?
MZ : J’aime bien les couleurs chaudes : le rouge, l’orange, le jaune.
CC : Toutes ces couleurs se retrouvent sur le visuel de ta pochette d’album
MZ : Oui c’est la liberté, s’assumer, j’aime la chaleur. Par exemple la chanson Feen, parle d’une personne qui se retrouve dans un pays où les frontières sont fermées et qui n’a aucune possibilité de bouger sans devoir demander des visas. Il dit de façon ironique qu’il est comme une lettre à la poste, qu’il faut être tamponné pour pouvoir bouger.
CC : Et si tu étais un oiseau ?
MZ : Complètement ! La chanson Ouhelt traduit aussi cette situation de blocage. Le morceau qui s’intitule La ! parle d’une personne qui a du mal à dire non, pour être plus libre.
Samuel Nja Kwa