ZANELE MUHOLI, l’Afrique du sud autrement
Pour la première fois en France, la Maison Européenne de la Photographie présente une œuvre monumentale de l’artiste et activiste sud-africain.e de renommé.e international.e Zanele Muholi. Plus de 200 photographies réalisées depuis le début de sa carrière, dans les années 2000, jusqu’à ce jour.
L’artiste, qui se définit, comme non binaire, milite pour les droits de la communauté LGBTQI A+ en Afrique du Sud. Chaque image est un acte politique. Le langage des corps, décomplexé, donne le ton de l’exposition et dévoile le quotidien d’une population, souvent abusée, qui vit une injustice au quotidien. Dans un entretien donné au magazine le Point, Zanele se souvient de la réaction de Madame Lulu Xingwana, Ministre des Arts et de la culture de l’époque, lors d’une exposition de la série Being à la Cour constitutionnelle en 2009. Elle « a claqué la porte parce qu’elle jugeait la série « immorale, offensante et contraire à la construction de la nation ». Elle a même qualifié la série de pornographique. Un tel langage, trompeur et incendiaire, pose un problème de sécurité lorsqu’il tombe entre de mauvaises mains, car l’ignorance rend les gens hostiles, furieux et violents. »
L’Afrique du Sud, cité comme premier pays africain à avoir voté la loi pour le mariage entre personnes de même sexe en 1996 a intégré les droits des LGBTQI dans sa constitution. Ce qui en fait un pays avancé malgré ses contradictions.
Zanele Muholi demeure à ce jour, l’artiste dont les œuvres sont les plus vues dans le monde. Il existe pourtant d’autres artistes, aussi doué.es que Zanele, qui, par peur d’arrestation ou de violence, s’auto-musèlent. C’est « l’une des conséquences de la réduction au silence des créateurs et des universitaires de la communauté homosexuelle est la fuite des cerveaux. Souligne-t-iel. Le continent perd certains des esprits les plus brillants qui ont fui leur pays pour leur propre sécurité et leur droit d’exprimer, de créer et de diffuser des informations. »
De nombreuses images noir et blanc, assez contrastées, comme pour marquer les esprits, qui interpellent et questionnent le visiteur. L’exposition, composée de plusieurs séries d’images, document l’Afrique du Sud Post Apartheid, où l’homosexualité est souvent considérée comme un héritage colonial, issu du monde occidental.
À travers la série Faces and Phases, Zanele est dans son rôle d’artiste activiste. Iel magnifie la population LGBTQIA+ et dénonce les faits de violence.
Dans une autre salle, la série d’autoportraits intitulée Somnyama Ngonyama, qui signifie « Salut à toi, lionne noire ! », met en scène Zanele, qui utilise différents objets du quotidiens récupérés dans des hôtels, des lieux de résidences durant ses voyages. Elle rend hommage à sa mère, qui a longtemps travaillé comme femme de ménage chez les blancs.
Samuel Nja Kwa
Exposition photographique à voir jusqu’au 21 mai 2023